6. Joas - Avec ou sans le sacrificateur

Joas avec le sacrificateur

Quelle bénédiction pour des enfants d'avoir des parents chrétiens qui, dès leur jeune âge, les éduquent selon les principes de la Parole de Dieu! Quel apport constructif pour leur avenir lorsque, en famille, ils entendent les histoires de la Bible ou que dès l'adolescence, ils participent à des camps chrétiens!

Toutefois il arrive que tant de privilèges tissent un cocon d'habitudes autour de l'enfant de parents chrétiens qui, ainsi, n'est pas préparé au monde qu'il devra affronter tôt ou tard. Si les parents lui interdisent tout, il se révoltera, et peut-être fuira-t-il le foyer familial pour goûter à une prétendue liberté. C'est pourquoi parents, qui désirez préparer vos enfants à la vie, ne prenez pas toujours les décisions pour eux, mais entraînez-les dès leur jeune âge à renoncer à eux-mêmes et à choisir délibérément le chemin du Seigneur!

Si certains languissent de pouvoir lire l'Ecriture sainte parce qu'ils ne l'ont jamais possédée, ce n'était surtout pas mon problème: chez mes parents, il n'y avait pas une Bible, mais vingt! J'entendais parler de Dieu toute la journée! Mais à un moment donné, j'ai dû choisir et tourner résolument le dos au chemin large. Ce fut la fascination d'une carrière musicale qui me fournit l'occasion d'un premier renoncement qui me coûtait vraiment... et l'appel du Seigneur fit le reste, une décision que je n'ai jamais regrettée.

Y aurait-il parmi les lecteurs de ces lignes un jeune homme ou une jeune fille au bénéfice de la salutaire influence de parents consacrés à Dieu, et qui n'ait encore jamais pris de décision personnelle sur le plan spirituel? Que le Seigneur vous fasse la grâce de faire le bon choix, peut-être dès ce jour!

Joas avait tous les privilèges. Sa vie fut épargnée lorsqu'il était encore au berceau, quand la cruelle Athalie mit à mort toute la race royale. Joschéba (ou Joschabeath), sa mère d'adoption, l'avait soustrait au massacre, le cachant dans la maison de l'Eternel pendant sept ans (2 R. 11 : 2-3). Pour échapper aux regards inquisiteurs de la reine-mère, Joas ne sortit guère du Temple (2 Ch. 22 : 11-12). Mais pendant ce temps son père adoptif, le souverain sacrificateur Jehojada, préparait son intronisation.

Et le jour vint où Joas, alors âgé de sept ans, s'assit sur un trône probablement trop grand pour lui, alors qu'une foule de sacrificateurs et de prêtres l'entouraient. Les trompettes sonnaient, les chorales exécutaient leurs plus beaux Psaumes alors que même des hommes en armes montaient la garde aux portes du Temple. Peut-être le jeune garçon ne savait pas trop ce qui lui arrivait, surtout quand le souverain sacrificateur prit une fiole d'huile pour la verser sur sa tête. Mais lorsque tout le peuple assemblé s'écria "Vive le roi!", il sut que toute cette mise en scène n'était pas simple jeu. D'autant plus qu'il apprit peu après que la reine-mère Athalie, qui terrorisait tout le monde, avait été frappée à mort! (2 R. 11:4-16; 2 Ch. 23:1-15)

Jehojada le souverain sacrificateur contracta ensuite une alliance entre l'Eternel, le roi et le peuple (2 R. 11:17; 2 Ch. 23:16); voici donc Joas placé au centre d'un serment par lequel la population de Juda tout entière s'engageait à servir Dieu sans compromis, tout en entourant le jeune roi de ses faveurs. Aussi, conséquence logique – même si Joas n'était pas encore en âge de mesurer la portée de ses actes – "il fit ce qui est droit aux yeux de l'Eternel tout le temps qu'il suivit les directives du sacrificateur Jehojada". (2 R. 12:2; cf. 2 Ch. 24:2)

Catapulté par ce tremplin de piété, Joas "eut la pensée de réparer la maison de l'Eternel" (2 Ch. 24:4) qui, après les trois règnes impies de Joram, Achazia et Athalie, en avait probablement bien besoin. Il assembla sacrificateurs et Lévites et leur donna des ordres précis à ce sujet. Et lorsqu'il constata retard et probablement négligence dans l'exécution des consignes, Joas convoqua même Jehojada son bienfaiteur, pour lui en faire le reproche.

On peut se demander comment ce souverain sacrificateur, si zélé pour l'Eternel, avait laissé aller les choses. Ce serait ignorer qu'il était alors déjà centenaire – il mourut à 130 ans (2 Ch. 24:15) – et qu'à cet âge, ce n'était certes plus à lui de tout contrôler. Peut-être n'avait-il plus la capacité physique de faire preuve d'autorité vis-à-vis des Lévites qui auraient dû se mettre à l'oeuvre. Ou bien, aurait-il négligé de préparer sa succession, demeurant aux commandes et obstruant ainsi le canal qui permet la formation des leaders au fil des générations... comme hélas c'est si souvent le cas dans les ministères de l'Eglise chrétienne contemporaine, parce que les conducteurs spirituels ne savent pas passer la main au moment opportun?

Les récits conjugués des Rois et des Chroniques évoquent les mesures prises pour pallier ces retards, afin que le service du Temple s'accomplisse à la satisfaction de tous! (2 Ch. 24:8-14) Ne devrions-nous pas nous laisser enseigner par ce récit biblique, et savoir prendre en temps voulu dans l'Eglise de Jésus-Christ les mesures indispensables pour assurer l'épanouissement normal des dons spirituels des générations montantes? Autre interrogation: Dans le cas du sacrificateur Jehojada, cette situation anormale aurait-elle contribué à générer les lamentables événements consécutifs à sa mort?

Joas sans le sacrificateur

Joas, un jeune garçon épargné, protégé, puis couronné. Un jeune homme qui pense à réparer la maison de l'Eternel, qui comprend qu'il faut se hâter et qui décide de continuer à prier! (2 Ch. 22:11; 23:7-16; 24:4-14)

Mais le second volet de cette vie tellement privilégiée sera fort différent; nous y trouvons un Joas instable et influençable, avant qu'il ne devienne physiquement incapable de régner. Que s'est-il passé?

"Après la mort de Jehojada, les chefs de Juda vinrent se prosterner devant le roi... le roi les écouta..." (2 Ch. 24:17) et ce fut la débâcle: abandon de la maison de l'Eternel et adoration des Astartés, avec toute l'immoralité qu'entraîne un tel culte.

L'Eternel suscite alors des prophètes pour semoncer Joas, mais il fait la sourde oreille (2 Ch. 24:18-19). Puis, lorsque le roi de Syrie s'apprête à envahir Juda, Joas dépouille la maison de l'Eternel et en prélève les trésors pour amadouer le roi de Syrie, une démarche qui s'avérera parfaitement inutile. (2 R. 12:17-18)

Intervient ensuite le fils du sacrificateur Jehojada, le prophète Zacharie – à ne pas confondre avec son homonyme du retour des captivités (il y a 27 Zacharie différents dans l'Ancien Testament!). "Revêtu de l'Esprit de Dieu", il exhorte le peuple entier: "Pourquoi transgressez-vous les commandements de l'Eternel? Vous ne prospérerez point; car vous avez abandonné l'Eternel, et il vous abandonnera" (2 Ch. 24 : 20)

La solennité d'un tel avertissement arrêtera-t-elle Joas sur la voie de perdition qu'il a empruntée? Eh bien non, puisqu'il n'empêchera pas la lapidation de Zacharie, le fils de son bienfaiteur Jehojada, à qui il doit tout! Il "ne se souvint pas de la bienveillance qu'avait eue pour lui Jehojada, père de Zacharie, et il fit périr son fils. Zacharie dit en mourant: Que l'Eternel voie, et qu'il fasse justice" (2 Ch. 24 : 21-22).

Or les événements vont se précipiter, puisqu'en quelques mois tout le royaume de Juda va basculer: l'Eternel permet aux Syriens de faire justice de Joas, ce roi ingrat. Après l'avoir blessé, ils le laissent dans de grandes souffrances sur le champ de bataille, et lorsqu'il est ramené au palais, ses propres serviteurs conspirent contre lui et l'assassinent. (2 Ch. 24:25).

Aujourd'hui encore, les pires malheurs peuvent survenir, quand des enfants de parents chrétiens – ou les nouvelles générations de l'Eglise – ne se souviennent plus de la piété de ceux qui les ont précédés, (cf. Ep. 6:1-3; Hé. 13:7) ni du prix qu'ils ont payé pour demeurer fidèles à "la foi transmise aux saints une fois pour toutes" (Jud. 3)

Ce n'est pas pour rien que, peu avant sa crucifixion, le Seigneur Jésus lui-même ait choisi ce moment dramatique pour prévenir les pharisiens – qui allaient sous peu le condamner – du juste jugement qui allait les frapper à leur tour: "...afin que retombe sur vous tout le sang innocent répandu sur la terre, depuis le sang d'Abel le juste jusqu'au sang de Zacharie, fils de Barachie, que vous avez tué entre le temple et l'autel". (Mt. 23 : 35)

Fils, ou petit-fils de Jehojada, peu importe! Il arrive que dans l'Ancien Testament, ces deux termes se confondent. (cf. Da. 5:11) Plus importante certes est cette double mention d'Abel et de Zacharie dans l'une des dernières paroles prononcées par le Seigneur au Temple de Jérusalem avant sa crucifixion. Car le Fils de Dieu apposait ainsi le sceau de son approbation sur la Bible hébraïque (l'Ancien Testament dans son ensemble). A cette époque, le livre sacré s'ouvrait par la Genèse (c'est toujours le cas aujourd'hui) et se refermait sur le deuxième Livre des Chroniques. C'était donc comme si Jésus avait déclaré aux pharisiens: tout le sang innocent versé – depuis Abel le juste à l'aube de l'histoire (selon le début de la Genèse) jusqu'à celui de Zacharie le martyr (mentionné tout à la fin de vos écrits sacrés) – retombera sur vous en malédiction. Car le crime de la crucifixion du Fils de Dieu, que vous êtes en train de fomenter, sera l'aboutissement de tous les assassinats de l'histoire, et les martyres d'Abel et de Zacharie ne font que présager celui de votre Messie!

Joas avait été comblé de tous les privilèges, mais il s'en est détourné et a fini par commettre le pire des crimes. Or, il n'est pas d'enfant de parents chrétiens ou de jeune disciple qui, à un moment précis de sa vie, ne doive personnellement faire le choix entre Dieu et le monde. De désastreuses influences orientèrent la fin de la carrière de Joas et le poussèrent vers l'idolâtrie. (2 Ch. 24:17) De même, les mauvais conseillers ne font jamais défaut (Esd. 4:5; Ez. 11:2, etc.) à l'heure cruciale où les jeunes chrétiens devraient se décider pour Jésus-Christ.

Dans la vie, il est de dangereux carrefours dont le diable profite pour disposer ses propres panneaux indicateurs, par exemple quand les parents croyants ne sont plus là pour entourer leurs enfants ou lorsqu'il s'agit du choix d'un futur conjoint. Et que de vies gâchées suite à une décision regrettable, alors que, dans nos Bibles, le triste exemple de Joas aurait dû servir d'avertissement de la part de Dieu. Peut- être n'est-ce pas trop tard pour quelqu'un?