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13. Joachaz, Jojakim, Jojakin, Sédécias - Dénouement lamentable d'une glorieuse épopée

1. Joachaz – Schallum

Véritable charnière entre les deux règnes de Josias et de son fils, la prophétie de Jérémie nous plonge dans la situation de Juda après l'ensevelissement de Josias:

"Ne pleurez point sur celui qui est mort (le roi Josias),
Et ne vous lamentez pas sur lui;
Pleurez, pleurez sur celui qui s'en va (Joachaz-Schallum),
Car il ne reviendra plus.
Il ne reverra plus le pays de sa naissance,
Car ainsi parle l'Eternel sur Schallum, fils de Josias, roi de Juda,
Qui régnait à la place de Josias, son père,
Et qui est sorti de ce lieu (Jérusalem):
Il n'y reviendra plus;
Mais il mourra dans le lieu où on l'emmène captif (l'Egypte),
Et il ne verra plus ce pays".
(Jé. 22:10-12)

Joachaz-Schallum ne régna que trois mois à Jérusalem...(2 R 23:31; 2 Ch 36:2) juste assez pour démontrer qu'à l'instar de tant de ses ancêtres, il fit "ce qui est mal aux yeux de l'Eternel". (2 R 23:32) Le prophète Ezéchiel évoque l'image d'un jeune lion que sa mère (Juda) avait élevé, avant qu'il ne fût pris dans la fosse des nations et emmené au pays d'Egypte. (Ez 19:2-4) Poursuivant la parabole, le prophète montre que la lionne prit un autre de ses lionceaux pour remplacer celui qu'elle avait perdu, jeune lion destiné, lui aussi, à être emmené captif, mais cette fois à Babylone. (Ez 19:5-9)

2. Eliakim - Jojakim

Les événements ne tardent pas à confirmer ces deux prophéties: Alors que le fils de Josias est détrôné puis enchaîné par Néco avant d'être déporté en Egypte et que Juda est lourdement taxé, (2 R 23:33-34a; 2 Ch 36:1-3) le pharaon prend lui-même l'initiative de remplacer Joachaz par son frère Eliakim, cet autre "jeune lion" sorti de l'antre de Juda.

Et pour bien signifier son autorité à Juda et à son nouveau roi, Néco change son nom en Jojakim. (2 R 22:34b; 2 Ch 36:4) Mais appartient-il à un monarque païen de désigner les occupants du trône de David? N'usurpe-t-il pas ainsi un rôle incombant à Dieu lui-même?

C'est peut-être ce que souligne la signification des deux noms: Eliakim = celui que Dieu établira – donc une perspective de foi pour l'avenir; Jojakim = l'Eternel l'établit – donc un acte par lequel l'homme attribue à Dieu ce qu'il fit lui-même. Aussi l'occupation de Juda par Néco sera-t-elle éphémère, puisqu'il devra reculer devant le "rouleau compresseur" babylonien submergeant tout le Proche-Orient.

Après avoir été esclave du roi d'Egypte, Jojakim est asservi à Nébucadnetsar, empereur récemment promu à Babylone (2 R 24:1) et qui, pendant près de quarante ans, dominera "jusqu'aux extrémités de la terre", selon l'expression choisie par le prophète Daniel. (Da 4:11,22) Dès le début de son règne, Nébucadnetsar envoie ses légions dans la région, avec un premier objectif, celui de prendre "tout ce qui était au roi d'Egypte, depuis le torrent d'Egypte jusqu'au fleuve de l'Euphrate". (2 R 24:7) Au passage, ses troupes envahissent Juda et infligent une grave défaite à Jojakim. (2 R 24:2-4)

Mais Dieu patiente avec lui, l'exhortant et l'avertissant dûment par ses envoyés. De la lointaine Chaldée où il avait déjà été exilé, Ezéchiel a prédit le sort du "deuxième jeune lion" auquel les nations mettent "une boucle à ses narines" avant de l'emmener dans "la forteresse" de Babylone "afin qu'on n'entende plus sa voix sur les montagnes d'Israël". (Ez 19:5-9)

De son côté, le prophète Jérémie dénonce en termes acerbes l'injustice et la luxure caractérisant la cour de Jojakim, (Jé 22:13-19) mais ce dernier n'y prend point garde. Au contraire, lorsque le prophète charge son secrétaire Baruc de lire au roi ses paroles d'avertissement consignées dans un livre, Jojakim s'en moque et s'empare du rouleau manuscrit pour le jeter dans le brasier enflammé qui est devant lui. (Jé 36:4-8, 21-24; Jé 36:25-26) Il veut aussi mettre la main sur Jérémie et Baruc son secrétaire, mais Dieu cache ses deux serviteurs, qui échappent ainsi à une mort certaine.

Lorsque l'homme s'oppose délibérément à un message transmis de la part de Dieu, il endosse une très solennelle responsabilité. Au cours de la lecture, Jojakim a jeté aux flammes le texte inspiré à Jérémie, un acte coupable qui a motivé une nouvelle sanction des plus sévères contre le roi indigne: "Tu as brûlé ce livre... C'est pourquoi ainsi parle l'Eternel sur Jojakim, roi de Juda: Aucun des siens ne sera assis sur le trône de David...".(Jé 36:29-30) Une prophétie qui se réalisera à la lettre, non seulement parce que son fils Jojakin sera emmené à Babylone après seulement trois mois de règne à Jérusalem, (2 Ch 36:9-10) mais parce que le nom de Jojakim ne sera même pas cité dans la lignée messianique des ancêtres du Messie. (cf. Mt 1:11; Jé 22:30)

Or un jugement inéluctable et tout aussi draconien guette ceux qui, de nos jours, détruisent les exemplaires de l'Ecriture sainte – ou déchirent les pages sacrées du Livre des livres en inculquant doutes et critiques aux victimes du rationalisme théologique. (cf. Ap. 22:18-19)

Mais revenons à Jojakim. De toute évidence, il s'endurcit, entraînant tout Juda dans l'impiété et l'idolâtrie. Après trois années de soumission au roi de Babylone, il se révolte contre lui (2 R 24:1; 2 Ch 36:13; Jé 52:3) la quatrième année de son règne.

Grave acte d'insubordination que ne saurait tolérer le nouvel empereur qui fait trembler le monde, et que Jérémie désigne comme "le marteau qui brise les nations". (Jé 51:20) Après sept ans de sursis, Nébucadnetsar fera lier Jojakim avec des chaînes de fer pour l'emprisonner à Babylone d'où, contrairement à Manassé, il ne reviendra pas. (cf. 2 Ch 33:13) Et le peuple du pays prend son fils Jojakin, âgé de huit ans (2 Ch 36:8- 9) – ou de dix-huit ans selon le deuxième livre des Rois (2 R 24:8) – pour le remplacer sur le trône.

3. Jojakin – Jéconia

Comme Jérémie avait précisé de la part de l'Eternel qu'aucun des fils de Jojakim ne serait digne de s'asseoir sur le trône de David, (Jé 36:30) le règne de Jojakin ne pouvait être que fort bref; il ne dura que trois mois et dix jours, (2 Ch 36:9) mais fut suffisant pour nous permettre de savoir que lui aussi "fit ce qui est mal aux yeux de l'Eternel". Aussi Nébucadnetsar le remplaça par son oncle Sédécias, le dernier roi de Juda. (2 R 24:17-18; 2 Ch 36:10) Quant à Jojakin, il fut emmené à Babylone avec tous les chefs de Juda et dix mille exilés, dont les charpentiers et les serruriers. (2 R 24:14-16) C'est l'accomplissement de ce que Jérémie avait annoncé au sujet de ce "vase méprisé" (Jojakin), "cet objet auquel on n'attache aucun prix": (Jé 22:28)

"Je suis vivant, dit l'Eternel.
Quand Jéconia, fils de Jojakim, roi de Juda, serait un anneau à ma main droite,
Je t'arracherais de là.
Je te livrerai entre les mains de ceux qui en veulent à ta vie... et devant qui tu trembles,
Entre les mains de Nébucadnetsar...
Je te jetterai, toi et ta mère qui t'a enfanté,
Dans un autre pays où vous n'êtes pas nés...
Mais dans le pays où ils auront le désir de retourner,
Ils ne retourneront pas".
(Jé 22:24-27)

C'est l'époque où Jérémie reçoit révélation de la part de Dieu que la captivité de Juda à Babylone devra durer 70 ans. (Jé 29:10; cf. Da 9:2) Il remet donc aux déportés un message destiné aux Juifs se trouvant déjà en Babylonie, pour qu'ils abandonnent leurs illusions quant à un rapide retournement de l'histoire, les exhortant au contraire à se construire des maisons, à planter des vignes dans le pays de leurs oppresseurs, et à chercher le bien de la cité (Jé 29:1-6) où ils sont réfugiés.

Mais si dans sa bonté, Dieu va jusqu'à révéler l'avenir à ses serviteurs les prophètes, les ressortissants de Juda n'y prendront pas garde et persisteront dans leur abandon de l'Eternel... exactement comme aujourd'hui notre génération se détourne de Dieu, malgré les avertissements incisifs de l'Ecriture sainte quant aux derniers temps. Jojakin déporté, Sédécias son successeur sur le trône continuera de pécher et de se moquer des prophètes que le ciel lui envoie, et de Jérémie en particulier. (cf. Jé 34, 37, etc.)

Jojakin est donc incarcéré à Babylone, apparemment jusqu'à la fin de ses jours. Tout laisse croire que son nom ne reparaîtra plus dans l'histoire biblique. Mais ce serait compter sans l'infinie miséricorde de Dieu qui se penchera sur la détresse de Jojakin, après 37 ans de dure captivité.

Certes il ne reverra plus sa patrie, mais l'Eternel inclinera le coeur d'Evil-Mérodac, le successeur de Nébucadnetsar, pour qu'il le sorte de son cachot, lui parle avec bonté, relève sa tête et le place parmi les rois qui mangent à sa table, pourvoyant ainsi à son entretien tous les jours de sa vie.

Cette "parenthèse de grâce" insérée dans la chrestomathie des châtiments et des captivités endurées par Juda apparaît exactement sous la même forme et dans les mêmes termes à la fin de deux livres de l'Ancien Testament, 2 Rois et Jérémie. (2 R 25:27-30; Jé 52:31-34) Les spécialistes en ont déduit que Jérémie devait être le principal compilateur des écrits rassemblés dans les deux livres des Rois. Mais il ne peut s'agir là que d'une hypothèse qui, en fait, n'est pas d'importance majeure face à l'essentiel: l'inspiration des écrivains sacrés, quels qu'ils soient. On n'a pas besoin de connaître les noms des scribes choisis, mais on sait qu'ils tous ont été poussés par l'Esprit (2 Pi 1:21) pour nous transmettre le message de l'Auteur divin dans son essence et selon le mode conçu par sa volonté.

4. Matthania – Sédécias

C'est encore Nébucadnetsar qui choisit le successeur de Jojakin. en la personne de Matthania son oncle. (2 R 24:17; 2 Ch 36:10) Peut-être n'avons-nous par perçu que trois frères, Joachaz, Jojakim et Matthania, tous fils de Josias, se sont succédé à la tête de Juda juste avant la captivité. En effet, après le court intermède où Jojakin, fils de Jojakim régna trois mois et dix jours alors qu'il était âgé de huit ans, le trône revint à son oncle Matthania, mieux connu sous le nom de Sédécias. Le fait que l'auteur du Deuxième Livre des Chroniques utilise le terme "frère" (2 Ch 36:10) à la place de neveu ne pose guère problème puisqu'il comporte dans l'hébreu – de même que le mot "fils" – une signification extensible pouvant couvrir deux générations.
Il y eut donc cinq rois de Josias à Sédécias. Mais en dépit du fait que le dernier roi de Juda ait occupé le trône pendant onze ans, (2 R 24:18; 2 Ch 36:11) il ne s'était écoulé que vingt-deux ou vingt-trois ans entre la mort de Josias et la prise de Jérusalem.

Se moquant des multiples avertissements adressés par Dieu à ses prédécesseurs, Sédécias fit ce qui est mal aux yeux de l'Eternel. (2 R 24:9; 2 Ch 32:2) Il endurcit son coeur, et ne s'humilia point lorsque Jérémie le supplia de revenir à son Dieu. (2 Ch 36:12; Jé 21:4-7; 22:9; 44:10, etc) Lui aussi se révolta contre le roi de Babylone. Aussi sera-t-il lui aussi emmené captif dans la capitale des Chaldéens. (2 R 24:20; 2 Ch 36:13)

Selon les historiens, la déportation de Juda s'opéra en trois étapes. Le premier contingent d'exilés quitta Jérusalem la quatrième année du règne de Jojakim, (cf. 2 R 24:1-4) autour de l'an 605. Un deuxième groupe de captifs fut emmené aux environs de l'an 597, lors du premier siège de Jérusalem par Nébucadnetsar à la fin du règne de Jojakim. (2 R 24:10-16) Et un troisième, peut-être le plus important, fut emmené par Nébuzaradan, le chef des gardes, (2 Ch 36:10) lors de la prise de la ville (2 R 25:8-11; 2 Ch 36:17-20) en l'an 586.

Le siège de Jérusalem avait duré trois ans, de la neuvième à la onzième année du règne de Sédécias. (2 R 25:1-2; Jé 52:4-6) Et alors que les défenseurs succombaient à la famine, une brèche fut ouverte dans la muraille, brèche par laquelle Sédécias et ses grands tentèrent de s'échapper en s'enfuyant vers la plaine de la Mer Morte. (2 R 25:4-5; Jé 52:7-8) Pendant ce temps, les armées babyloniennes investirent Jérusalem, brûlèrent et pillèrent le temple ainsi que tous les édifices d'importance, démolirent les murailles de la ville, et firent une multitude de prisonniers. (2 R 25:8-19) Des événements dramatiques, que depuis des décennies prédisaient les prophètes. (2 R 21:13; Es 39:6-7; Jé 4:10, 6:6, 21:10; Ez 24:2, etc.)

Par ailleurs, les armées d'invasion rattrapèrent le roi et ses grands dans leur fuite et les emmenèrent captifs devant Nébucadnetsar, qui tenait sa cour à Ribla, en Syrie. Les fils de Sédécias furent égorgés en présence de leur père, avant que le roi ne lui crève les yeux, (2 R 25:7; Jé 52:9) pour bien montrer qu'on ne pouvait narguer impunément le maître de l'univers de l'époque...

Mais Dieu contrôle toujours les hommes, et il va jusqu'à mesurer d'avance leurs actes de cruauté. Depuis plusieurs années, les prophètes avaient annoncé les dramatiques événements de la captivité de Sédécias à Babylone. Alors que Jérémie l'avait prévenu en ces termes: "Tes yeux verront le roi de Babylone... et tu iras à Babylone", (Jé 34:3) Ezéchiel, pourtant à mille kilomètres de Jérusalem, avait prophétisé de manière si claire les circonstances de la fuite du roi, que la précision du message de Dieu dut lui poser problème. En effet, au sujet de Sédécias, il écrivit:

"J'étendrai mon rets sur lui,
Et il sera pris dans mon filet;
Je l'emmènerai à Babylone, dans le pays des Chaldéens;
mais il ne le verra pas, et il y mourra".
(Ez 12:13)

Cette apparente contradiction ne faisait que dépeindre l'histoire à l'avance: Sédécias fut emmené à Babylone et il y mourut, mais il ne vit jamais la célèbre cité des jardins suspendus, puisque Nébucadnetsar lui avait crevé les yeux à Ribla!

La conclusion qu'apporte à ce récit le deuxième Livre des Chroniques ne se confine pas au drame de la captivité de Sédécias. Elle évoque le lamentable dénouement d'une glorieuse épopée, celle des rois de Juda qui, en vertu de la patience de Dieu, s'était prolongée durant quatre siècles:

"L'Eternel, le Dieu de leurs pères, donna de bonne heure à ses envoyés la mission de les avertir, car il voulait épargner son peuple et sa propre demeure. Mais ils se moquèrent des envoyés de Dieu, ils méprisèrent ses paroles et ils se raillèrent de ses prophètes, jusqu'à ce que la colère de l'Eternel devienne sans remède". (2 Ch 36:15-16)

Fort heureusement, Dieu n'avait pas encore écrit le mot "fin" au chapitre de l'histoire consacré aux descendants de David. Car, après le sombre tunnel des captivités, le trône de Juda devait... doit être un jour réinvesti! La faillite des héritiers de la couronne ne rend-elle pas encore plus impérative la venue du Messie, le seul parfaitement digne de monter sur le trône de David? (cf. Ge 49:10; 1 S 7, etc.)

 


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